Une coutume matrimoniale à Letia, par Patrick Cerutti.

 

Dans Mariuccia da Vico. Novella (Ajaccio, Stamparia di A Muvra, 1938), Giovan Vito Grimaldi (1804-1864), docteur en médecine, professeur de philosophie au Collège d’Ajaccio, puis inspecteur des écoles primaires, raconte une tradition amoureuse étrange propre à Letia et au vicolais. Mais, comme Salvatore Viale, on pourrait le soupçonner d’embellir l’anecdote. Voici l’analyse qu’en propose Chantal Kiman-Colonna dans Les reflets de la réalité médiévale (Mémoire soutenu à l’Université de Corse, p. 64). L’auteur affirme que cette coutume existait encore dans les années 1980. 

« Très peu des coutumes qui se rattachent aux moments importants de la vie et de la mort, sont décrites dans les nouvelles et récits médiévaux comme dans les passages des chroniques qu’elles évoquent. Un voile est tendu devant certains rites, par exemple ceux qui entourent la cérémonie du mariage. En Corse, au Moyen-âge, le prêtre assiste et conseille, il est le protecteur naturel des femmes en difficulté morale. Le mariage n’est pas l’exemple unique, puisque les rites qui concernent la mort naturelle ne sont pas évoqués non plus dans ces nouvelles, ni ceux eu égard à la naissance. 

La femme est le “[...] condimento” le plus suave[1], note sensuelle qui, très éloignée de la rigidité des rapports humains familiaux décrits par Mérimée, dans Matteo Falcone et bouleverse les structures traditionnelles de l’univers affectif, se rapporte d’une part à l’amour réciproque des conjoints et d’autre part aux sentiments, partagés, du père et de sa fille sur laquelle repose l’honneur de la famille dont le nom est son seul héritage[2]

La tradition, décrite par Giovan Vito Grimaldi, est encore vivante dans le village de Vico, dans les années 1980-1985, et dans tous les cantons il est une occasion de réjouissances, mais dans ceux de Vico et de Letia, il est marqué par l’empreinte d’une conscience folklorique certaine, qui est rendue par ses scènes épiques. 

Celles-ci semblent être une sorte de reflet des exploits chevaleresques et de l’attitude des dames décrits dans la littérature courtoise médiévale. 

Une foule de personnes, qui fourmille sur les places et autour du village, regarde descendre, le long de l’escarpement de Sant’Antonio, un valeureux cavalier sur son rapide destrier, du côté de Letia et de Chigliani, suivi par d’autres, à bride abattue. Dans cette course ou : “Correre il vanto”, le premier qui arrive à la travata, arc de triomphe ou ruban tendu sur le chemin que suit la mariée, depuis son domicile, et son cortège, s’empare des clefs de la maison de l’époux afin de les remettre à la jeune épouse. Selon la coutume, le cavalier refuse de payer le petit tribut, qui autorise le passage de la travata, car il a “[...] colto il più bel fiore di Letia per donarlo a Vico”, dit-il aux sentinelles, mais celles-ci ne lui accordent pas ce privilège. Le cavalier excite avec fureur son cheval pommelé qu’il nomme Terrore, et “[...] quasi sorvolando d’un salto la barriera, si lasciò un buon tratto addietro gli attoniti circostanti”, tout obstacle est alors ôté et la mariée, heureuse, remercie son valeureux champion. À la suite de son triomphe, le cavalier participe à la serenata donnée en l’honneur de l’épousée »[3]

Cette description recoupe par beaucoup d’aspects celle que donne Joseph Ernest Rossi des pratiques matrimoniales en Corse au XIXème dans Les Corses d’après l’histoire, la légende et la poésie (Poitiers, Imprimerie de Marche, 1900). Dans sa longue et très riche description (centrée plutôt autour de Zonza, Carchetto et la région du Coscione), on retrouve ces différents moments, qu’il rapproche systématiquement des mœurs serbes et des pratiques de la Rome antique : 

« La veille du jour fixé pour le mariage, le fiancé se rend dans le village de la jeune fille ; de nombreux cavaliers l’accompagnent. On dirait un beau capitaine qui court par monts et par vaux. Il s’élance noble et fier à la conquête de la dame qui a captivé son cœur.  

Mais le village dans lequel va pénétrer sa petite troupe relève d’autorités qui ont le droit de lui commander de se soumettre aux usages reçus.  

Des hommes postés à l’entrée de ce village saluent les cavaliers, leur font bon accueil : puis ils les prient de descendre de cheval, de mettre tout au moins le pied hors de l’étrier, et de faire ainsi acte de soumission et d’obéissance.  

Les cavaliers refusent parfois de rendre cet hommage.  

Ce refus peut susciter des querelles ; il est même la cause de luttes sanglantes.  

Certes, voilà une coutume peu en harmonie avec nos mœurs civilisées. Blâmons-la ; mais ne peut-on pas voir dans ces faits l’influence persistante d’une époque où les seigneurs hautainement jaloux de leurs privilèges, ne laissaient pénétrer qu’avec leur agrément sur les terres de leur seigneurie ? » (p. 154). 

« Le lendemain a lieu la cérémonie du mariage et le départ de la jeune fille.  

Une violence factice arrache la mariée aux bras de sa famille, et la soustrait ainsi à l’autorité du village.  

Les parents et les amis qui doivent accompagner les époux se groupent à la sortie du village, près de la travata ; c’est une sorte d’arc de triomphe orné de fleurs des champs » (p. 159). 

« Le cortège poursuit sa marche joyeuse ; souvent la fusillade retentit bruyante dans les sentiers suivis.  

Tout à coup on les voit revenir aussi agiles, aussi rapides qu’au départ. L’un d’eux s’approche de la mariée, il s’incline bien bas et offre le bouquet cueilli dans les champs voisins. Gracieuse, la mariée sourit et permet au cavalier de déposer un baiser sur son front. C’est la cérémonie du fiore, de la fleur, du bouquet » (p. 160). 

« Tout à coup, à un signal donné, plusieurs cavaliers d’élancent et dévorent l’espace. Les bravos de la foule encouragent ceux qui marchent au premier rang ; les traînards sont l’objet d’inoffensives railleries. Cependant, les cavaliers font tous les efforts, déploient toutes les ruses pour arriver les premiers à la maison du marié. Là, la belle-mère se tient debout sur le seuil, le vanto à la main. Le vanto consiste parfois en un bouquet ; le plus souvent il se compose d’une clé, d’une quenouille, d’un voile. Le plus heureux des cavaliers reçoit le vanto, et revient, bride abattue, en faire hommage à la mariée » (p. 165). 

« La manière dont le jeune fille est arrachée en apparence aux bras de sa mère au moment de quitter le village, le simulacre de l’enlèvement dans le village du mari, la scène qui a lieu devant le seuil de la maison, la remise d’une quenouille, d’un fuseau, les plaisanteries parfois trop libres à l’égard du mari, l’habitude de placer un enfant mâle sur les genoux de la mariée, la pièce de monnaie remise aux plus proches parents, les cadeaux, le vanto, les grazie, tout rappelle les cérémonies et les usages romains ».  

« Si le plébéien romain sépare légèrement avec un javelot les chevaux de sa jeune épouse, s’il promène la pointe de ce javelot sur la tête de sa femme et prouve ainsi qu’il la possède par droit de conquête », le mari corse amène son épouse au milieu d’une troupe aux allures guerrières. Il témoigne ainsi qu’il a le droit de l’introduire dans la maison de ses ancêtres et de former une nouvelle famille (p. 169). 

On raconte encore aujourd’hui des histoires identiques concernant divers mariages de jeunes de Cugugnana qui se rendaient à Rennu, où le prétendant allait à cheval jusqu’au hameau du Poggiu où était installé un arc de triomphe ou un mât décoré de fleurs. Le futur époux, escorté de ses camarades, prenait un bouquet, transporté jusqu’au domicile de la future épouse. La cavalcade se terminait là. Nombre de jeunes du village trouvaient épouse à Rennu, tandis que d’autres de Rennu trouvaient épouses à Cugugnana. Ces coutumes se seraient perpétuées jusqu’aux années 1800. 

Les parents et amis du marié, qui se rendaient de Letia au village de la mariée pour la ramener à Letia, étaient nommé i mariaticci. Ils escortaient la mariée et le marié à cheval et un arc de triomphe de fleurs était dressé à l’Albariccia, à l’entrée du village. À l’arrivée au village, le marié ou des membres de sa famille jetaient aux enfants e baioche (les « sous troués », ancienne monnaie du Vatican), c’est-à-dire des pièces de monnaie. Les enfants du village escortaient avec les familles, les mariés jusqu’à l’église. À la sortie, avant de se rendre à la fête, une profusion de riz était jetée sur les mariés. À partir de 1850, environ, date de la construction de la route entre le col Saint Roch et le village, la mariée arrivait dans une calèche habillée de fleurs. 

En 1987, Jean-Darius Mercury (1900-1999), le père de notre ami regretté Francis Mercury, racontait que, dans les années 1920 à Letia, au mariage de Dominique et Pauline Chiappini, les grands-parents de Bernard Chiappini, le cortège nuptial arrivant de Soccia, où Zia Paulella avait de la famille, était passé au hameau de la Porta à San Martinu. Il était précédé par les « mugliacheri » (du mot « moglia », épouse), sorte de cavaliers armés de fusils qui se déplaçaient au grand galop en faisant des aller-retours et surtout en faisant pétarader leur artillerie à la manière d’une fantasia marocaine.  



[1]Cf. F.O. Renucci, Novelle storiche corse, La Fedeltà coniugale. op. cit., p. 15.

[2]Cf. G.V. Grimaldi, Mariuccia da Vico. Novella, op. cit., p. 16.

[3]. Ibid., p. 15.

 

 

U VOCERU

Exemple de Voceru.

La communauté de Letia se déplaçait pour assister  aux obsèques qui se déroulaient dans les villages voisins où elle envoyait une délégation de "ballatarore", aptes à mener un "Chiami e rispondi", lors de la "scirata", et à engager l'échange par les poésies traditionnelles, pour ce type de cérémonies, afin d' honorer le défunt et sa famille. Cet hommage au mort se déroulait généralement sur la place publique et devant la maison du défunt, dont le corps était exposé dans son cercueil, déposé sur une table. Le texte ci-dessous relate l'échange survenu entre une "ballatarora" de Rennu qui interpella la délégation de Letia arrivant dans ce village pour assister à la "scirata" à l'occasion d'obsèques. La délégation s'était faite apostropher avec virulence par une "ballatarora" de Rennu et la réponse fut tout aussi virulente. Il s'agit ici d'un incident rarissime et exceptionnel pour ce type de cérémonie, généralement digne et respectueux des familles endeuillées.

Fernand Ettori, « Le vocero comme catharsis des tensions familiales et sociales », Etudes corses, 1979, n°12-13, p. 177-199, p. 193.                                                                                                                                                                                                                    Voceru cuntrastatu trà Rinnesi è Litiesi (inédit)

Enterrement à Rennu. Arrive le cortège des condoléants (scirata) venu de Letia. Certains trouvent que leurs démonstrations d’affliction manquent de vivacité. Une femme les apostrophe ainsi :  

           Sete ghjunti, o Litiesi              Vous voilà, Létiais, 

           Sete di pocu valore,                Vous ne valez pas grand-chose, 

A’ mumentu sintarete              Tout à l’heure, vous entendrez 

Di lu Poghju u rimone             La clameur du Poghju [un hameau de Renno].

 

 

Réponse d’une vocératrice de Letia :  

O tu ch mi sè luntanu             Toi qui te tiens au loin,  

Venimi qu vicinu.                    Viens ici près de moi.  

Hai pocu naturale,                   Tu n’as guère de courage,  

Sè figliola di Fughjinu………...Tu es fille de papa Fuyard.  

Saparè chὶ i Litiesi                   Tu sauras que des Létiais 

Un’ si n’hè mai risu nimu.       Personne ne s’est jamais moqué.  

Si tu tirarè avanti,                    Si tu continues,  

Sintare u galatinu                    On t’apprendra la politesse. 

 

 

Note : galatinu : plus couramment galateu, d’après le titre du livre célèbre de Mgr della Casa, Amparà u Galateu, apprendre le savoir-vivre est une expression courante en corse (comme, du reste, en italien).

 

 Preghera di Natale

 

   

Eccu le voce di l’antichi chi purtonu la nutizia

Cu lu versu è cu la rima è senza malizia.

Pigliate inchjostru è penna,

Di carta una grande foglia.

Si la musa ci accumpagna

Vulemu scrive è sparte questa la storia.

  Padre nostru di Natale

Cette prière, récitée traditionnellement à Letia à Noël, a été conservée et transcrite par Roccu Multedo. « Il existe -rappelle l’historien- plusieurs versions corses des prières que les enfants récitaient naguère andendu à chjinassi. Dans la région bastiaise, nos grands-mères enlevaient leur bague et nous la mettaient sur la tête pendant la prière du coucher. Elles faisaient à la fin un signe de croix sur notre tête et nous faisaient embrasser la bague. J’ai recueilli les versions de Bastia, Azilonu, Cognocoli, Muratu et Letia, dont le texte m’a paru le plus original ».

(Le mazzerisme. Un chamanisme corse, Paris, Arkanorum, 1994, p. 170).

La prière évoque San Michele, l’ancien saint patron de la communauté de Cucugnana et San Martinu qui demeure le saint protecteur du hameau de Pont’in ghjò, qui porte son nom. L’église originelle San Michele était située à trois cents mètres du vieux village de Cosju, détruit par Gênes au Moyen-âge. Elle a été abandonnée en 1703 et l’église paroissiale a été installée au coeur du hameau de Cugugnana dans l’oratoire dédié initialement à Saint Jacques, puis à Saint Roch. Reconstruite en 1882, son parvis permet de découvrir, à l’est, la haute vallée du Fiume Grossu et le monte d’Oru, ainsi qu’au Sud, le massif du Libbiu, la basse vallée du Liamone, la Cinarca et le castellu Pozzo di Borgo qui domine Ajaccio avec la pointe de la Lisa.

L’église dédiée à San Martinu remonte également au Moyen-âge. Elle a été plusieurs fois agrandie au cours des siècles, une dernière fois en 1884, où elle prit sa forme monumentale actuelle sur la butte majestueuse qui domine le Liamone.

 

 


« Padre nostru di Natale,                      « Le Notre Père de la Noël,

Biatu puru à chi l’ampara.                    Bienheureux qui veut l’apprendre.

L’amparò u pilligrinu                           Un qui l’apprit ? Un pèlerin

E a disse à San Martinu.                       Qui le transmit à Saint Martin ;             

San Martinu cullò in celu                      Puis Saint Martin monta au ciel                      

E a disse à San Michele.                       Et le transmit à Saint Michel ;

San Michele aprὶ le porte                      Saint Michel ouvrit les portes,

Di li vivi e di li morti.                           Celles des morts et des vivants.    

Una petra di mattone                            Une brique en terre cuite :

Tutti l’anghjuli in balcone ;                  Tous les anges à la fenêtre ;

Una petra di baina,                                Une autre pierre, d’ardoise :  

Tutti l’anghjuli in duttrina ;                  Tous les anges au catéchisme ;  

Una petra liscia liscia,                           Une pierre toute lisse :

Tutta l’acqua ci sculiscia ;                     L’eau du ciel toute y glisse ;                           

Una petra tonda tonda,                          Une pierre toute ronde :            

Tutta l’acqua ci s’abonda.                     C’est toute l’eau qui abonde.

Si abundò tantu è tantu,                         Elle y abonda tellement

Nostra Madre si calò ;                           Que la Madonne s’y pencha

Beppe tantu di quell’acqua                    Elle en but alors tant et tant

Chi d’un figliu ingradivò.                      Que d’un garçon elle enfanta.

Quandu nascὶ quellu figliu                     Lorsque naquit ce bel enfant,

Tutt’el mondu alluminò.                        Le monde entier s’illumina.

Canta, canta ros’e fiori,                         Chantez, les roses et les fleurs,

Natu hè Nostru Signore.                        Car nous est né notre Seigneur.

Natu hè a Betelemme                             Ça s’est passé à Bethleem

Al mezu al bue, è l’asinellu.                   Entre le bœuf et l’âne gris,

Per cuprὶ à Gesù Bellu,                           Sans lange et sans couverture                                                                                    

Un c’era fascia nè mantellu                    Pour protéger l’enfant Jésus.                         

A chi lu sa a chi lu dice,                         Que celui qui sait ces choses les proclame,

A ch’un lu sa, ghiusta hè d’amparallu.   Celui qui n’en sait rien, c’est bien qu’on l’instruise

A la fine di lu mondu                              Puisqu’un jour, à la fin des temps,

Ci truvaremu tutti riuniti ».                     Nous nous trouverons tous unis ».


 


Editions  Letia -Catena


 

 

 

                                                                   

 

                                                                         So vultati a lu rughjone

 

                                                                         *******************

 

                   So ghjunti filastroca tutti quelli d’una volta                                                                              

 

 

 

 So vultati a lu rughjone ,   

ann’armatu ball’e sonu. 

Sofianu mille trumbete . 

Centu toni e saete. 

Annunciendu l’arrivu, 

sonanu lu viulinu.

 

Daretu a prete Sumbaghjulu, 

a chi a pedi o a cavalu, 

so vultati a lu rughjone, 

u pievanu e Zampaglinu. 

Dice che ghjuntu ancu Macchione.  

Prete Santu cu Pilinu.

 

A brace cu Sumintinu  

Passa Mastagacciu e Zampinu. 

Eccu u dettu Pulione. 

A fiancu vene Putachione. 

U me parente Tchanfuglinu, 

a brace cu Ligathjinu.

 

Due zucche in battagliolu, 

u nostr’anticu Frascachiolu, 

a brace cu Lausinu , 

per lu chiassu fa caminu. 

Arrimbatu a ziu Testone, 

e ghjuntu ancu  Battindone.

 

Da direzione incunisciuta, 

affaca Paccialu e ci saluta. 

Eccuci a Bacinelu, 

Calasima e Pigurelu. 

Ne sueta ziu Farinelu. 

E vultatu Funicelu. 

 

Eccuci a Lacha-fa. 

E ghjuntu ancu Trambagjia. 

U stazzunaru Chanchetu,  

 ne sueta ziu Muchetu. 

Bugarone, Bugarunetu, 

Tracola cu lu sunetu 

 

Para-sacchu e Tchichitinu,                               

per  lu tchiassu  fanu caminu. 

Davanti biaghia Caggeone, 

Pipa acesa e Pepone, 

Pignotu cu Capurale, 

Limusinu e Minighale. 

 

E vultatu ancu ziu Ricciu 

Cu Mattosu e Petru Ficu, 

Carnava in cu Tavone, 

Caramei è po Grigeone. 

Eccuci’ a Canella, cu Miotu, 

Pillicinu cu Fangotu. 

 

A brace cu ziu Paglieta, 

vene Leru cu Bicheta. 

E ghjiuntu Braga cu Tchipone. 

Ne sueta ancu Pumpone, 

Bagali  in cu ziu Frigniolu, 

eccu ci a Boce cu Schaghiolu. 

 

Ne e scalatu ancu Petracciu, 

ziu ministru e Martinacciu. 

Poi ne ghjiuntu Farazzinu, 

Tamburu cu Carapinu. 

Cazithiu ,Vescu e Buttachione, 

Bichatellu cu Lambrone. 

 

Eccuci li Tumagjathji, 

cu tutti li Sansunatghji. 

Sonanu lu viulinu, 

centu fiaschi di vinu. 

Di Balta lu muschatellu, 

di Villa lu tchacharellu.  

 

So vultati a lu rughjone 

antichi e antichoni. 

Annu ricunisciutu la fileta,  

l’aspetavamu per fa festa. 

Tutti quelli di calafunia , 

longa fu la cumpagnia.                     

 

a Paolina

Di u figliolu di Giacintu chiama vogliu lu nome.
Pruclamatu à lu cunventu capu di la Nazione
da i patrioti, accolti da Clemente, è di tutti li rughjoni (bis).


Signor Bappu, ne feci l'unità di Corsica lu Regnu.
Cù lu squadrone volante, bracciu armatu di u to disegnu.
Cù lu Moru incurunatu di la Nazione lu segnu (bis).


Di e luce di lu seculu, feci custitutione.
Guido lu to guvernu, e la sventura imperiale.
Inspiro in di l’America l’attu fundamentale.(bis)


Ramintà voglia lu nome di l'armata paolina.
Suldati chjamati Letia, d'Arrighi la cumpagnia.
Quelli di la truppa pagata, vulintarii d'infanteria (bis).

Ann’alzatu lu vechju cunfalone, arracamatu.
Porta testimonianza di e virtù di la Nazione,
U valore di li Suldati di Cirnu li battaglioni (bis).


Ch'ellu ne fermi la memoria di i squadroni di ghjustizia.
U capu francese domandò l'armistizia.
In Borgu ne rindi l'arme davant'à la milizia (bis).


Da Borgu à Ponte Novu, fu l'ultimu surisu, ô gloriosi,
poveri, pochi è senza artiglieria,
a lu nome di a Patria è quellu di Maria (bis).

Le lamentu composé à Letia après les combats de 1768 - 1769

Notre communauté de Letia a pu retrouver, grâce à Jean Laurent Arrighi, l’ensemble du texte du Lamentu qui évoque la guerre de 1768-1769, menée lors de l’invasion de la Corse par les troupes de Louis XV. Il a publié ce texte en entier, dont seules quelques strophes subsistaient dans la mémoire collective de la communauté de Letia. Ce lamentu, composé à Letia à l’époque de ces combats par une femme du village, a été publié par Jean Laurent Arrighi dans l’œuvre monumentale, qu’il a rédigée en grande partie, et dont il a coordonné la rédaction et l’édition : « Vico Sagone, regards sur une terre et des hommes ». Editions Alain Piazzola, 2016.

Ces strophes peuvent évoquer les lendemains des combats, menés lors de la victoire de Borgo, du 10 octobre 1768, auxquels participa la compagnie letiaise d’Ignaziu Arrighi, ou plus sûrement le combat ultime de l’infelice battaglia di Ponte Novu, du 9 mai 1769. Instituteur à Vico, le père de Jean Laurent, Martin Arrighi, avait pris soin de noter chaque parole de ce texte qui lui avaient été transmises par Jean Baptiste Rossi, lequel les tenaient de Ghjuvan ’Andria Rossi di la Noce à San Roccu di Letia, décédé à Letia après 1910.

Quandu ghjunse la nutizia

di tamentu scumpiimentu

Ne partimu a mezza notte

A pedi da lu cunventu

Mille fiàccule di deda

Da Letia partinu a tempu

A voi cari Pumuntinchi

Eiu so ghjunta cui sta mane

Cu lu me figliolu abbate

Circhendu u me capitanu

Ma nisunu u m’ha insignatu

Ohimè ! O chi affanu !

Trovu anu lu so cavallu

Cu la sella Sanguinosa

Piu sottu à lu capitanu.

Circate ind’ellu riposa !

S’ellu hè mortu li faremu

La scirata lacrimosa